
La fissuration du sol : une technique clé de la transition agroécologique
Nos équipes Le 11/02/2025La fissuration du sol offre une solution efficace pour préserver la structure tout en facilitant une transition progressive vers l’agriculture de conservation.

L’agriculture de conservation des sols vise à limiter autant que possible le travail du sol. Cela permet de stabiliser la structure du sol et d’en améliorer la fertilité biologique. Cependant, son adoption demande des investissements, notamment en matériel de semis direct. Elle nécessite également une évolution des pratiques agronomiques. Aussi, dans le cadre du programme d’agriculture régénératrice soutenu par Saint Louis Sucre, Jérôme Caullier a exploré une autre approche alternative : la fissuration du sol. Cette technique est le thème de son mémoire réalisé dans le cadre de la formation Badge en 2024 à l’Institut UniLaSalle de Beauvais.

« Dans ma mission de conseil, j’adapte mes préconisations pour accompagner les planteurs dans une transition progressive sans prise de risque financier, explique-t-il. Cette méthode réduit l’intensité du travail du sol, favorise l’aération des horizons et accroît la matière organique. Par ailleurs, en fissurant le sol, on lui redonne de la verticalité tout en évitant au maximum de bouleverser sa structure. »
Des outils adaptés pour une transition en douceur
La fissuration du sol permet aux agriculteurs de tester progressivement une technique de conservation sans renoncer totalement au labour. En modifiant simplement leurs équipements, comme le remplacement des dents d’un déchaumeur, ils peuvent s’initier à cette méthode pour un coût raisonnable (environ 2 500 euros).
Cette approche ne contraint pas les agriculteurs à abandonner immédiatement le labour pour des cultures exigeantes, comme la betterave. Appliquée à l’échelle de la rotation, elle offre ainsi aux agriculteurs une solution flexible et évolutive.
La fissuration du sol améliore la structure des sols agricoles sans avoir à investir lourdement dans du matériel.

Une structure de sol préservée
La fissuration du sol présente plusieurs avantages :
- Respect des horizons naturels. Les dents limitent la remontée de terre infertile et préservent la matière organique, tout en maintenant les bactéries dans leur environnement optimal (bactéries aérobies en surface, bactéries anaérobies en profondeur).
- Amélioration de la porosité. L’eau circule mieux dans le sol et les racines accèdent plus facilement aux ressources.
- Réduction des coûts de mécanisation. Cette technique diminue la consommation de carburant et les coûts associés.
En comparaison, les techniques de sous-solage ou de décompactage perturbent davantage le sol, créant parfois des mottes ou des zones vides qui nuisent au développement des cultures. De plus, avec la fissuration, les zones non travaillées entre les dents gardent de la portance.
Deux types de fissuration selon les besoins
Fissuration profonde (20-35 cm). Réalisée en fin d’été, elle décompose les résidus végétaux et apporte de la flexibilité pour installer les couverts végétaux. Un passage de herse peigne le sol après la fissuration, le nivelle et permet d’extraire les mauvaises herbes.
Micro-fissuration (jusqu’à 15 cm). Effectuée au printemps, elle aère et réchauffe le sol avant les semis. L’utilisation de rouleaux pour refermer les sillons est nécessaire.

Perspectives et défis
Intégrée dans les rotations, la fissuration améliore progressivement la structure du sol. Toutefois, son impact économique reste à confirmer. « Des essais du programme Mont Blanc pourraient être menés chez les agriculteurs et sur la ferme d’Étrépagny pour mieux évaluer ses avantages financiers à long terme en rotation betteravière », suggère Jérôme Caullier dans la conclusion de son mémoire.
Enfin, cette technique simplifiée de travail du sol ne suffit pas à elle seule pour assurer une transition vers l’agriculture de conservation. Elle doit s'inscrire dans une approche globale intégrant l’état du sol, les formulations d’engrais, les apports organiques, la gestion des couverts et l’équilibre des rotations.



